La Tunisie célèbre aujourd’hui la Journée nationale de la femme. La Tunisienne est, en effet, l’unique femme dans le monde à qui on rend hommage deux fois par an : le 8 mars, la Journée internationale de la femme qu’elle fête avec toutes ses consœurs du monde entier, et le 13 août, fête nationale de la femme tunisienne.
Depuis le 13 août 1956, date de l’adoption du «Code du statut personnel», femmes, hommes, associations, organisations et partis politiques modernistes et démocrates se sont engagés dans cette bataille pour renforcer les droits de la femme tunisienne. Après la révolution, les efforts se sont multipliés pour lutter contre tous genres de discriminations à l’égard des femmes: politiques, publiques, sociales…
L’histoire de la Tunisie est marquée par de nombreuses figures féminines ancrées dans la mémoire collective pour leur rôle politique important : Elyssa (Didon), fondatrice de Carthage (IXe siècle avant J-C), la Kahena, figure emblématique de la résistance berbère contre la conquête arabe en Afrique du Nord (VIIe siècle) ou encore Aziza Othmana, princesse bienfaitrice des pauvres et indigents (XVIIe siècle).
Dès 1930, Tahar Haddad, penseur, homme politique et syndicaliste tunisien, fut l’un des premiers à soulever la question du statut personnel des femmes défendant l’égalité totale, y compris en matière d’héritage.
Le Code du statut personnel
Au lendemain de l’Indépendance, en 1956, Habib Bourguiba, premier président tunisien, intègre l’émancipation de la femme comme pilier fondamental de l’édification d’un État moderne. Le droit de vote est ainsi accordé aux Tunisiennes. La scolarisation des filles devient obligatoire et gratuite. Un nouveau code de la famille, le Code du statut personnel (CSP) est promulgué. Il abolit la polygamie et la répudiation, met fin au mariage forcé, et permet le divorce. La Tunisie se place à l’avant-garde du monde arabo-musulman, en matière d’égalité entre femmes et hommes.
Les Tunisiennes, représentent 51% de la population, constituent 64% des lauréats au baccalauréat, 69 % des diplômés du supérieur, 49 % des cadres supérieurs et techniques, et 39 % de la fonction publique. Elles sont fortement représentées dans certaines professions, comme la magistrature (32 % de femmes), le barreau (31 %), la médecine (42 %), la pharmacie (27 %), l’enseignement universitaire (40 %)…
Mais… c’est la femme rurale qui bénéficiera de notre attention aujourd’hui, surtout en ces dernières années de « révolution » qui ont complètement métamorphosé la société tunisienne. En bien et en mal.
La femme tunisienne
Si durant ces onze dernières années et surtout en cette année 2020,avec l’avènement du Covid-19 qui a figé le monde entier, il n’y a pas eu de pénurie de légumes, de fruits, de condiments, de laitages, et autres petits services et produits parfois insoupçonnables, c’est bien grâce à cette femme tunisienne qui a payé de sa santé, parfois de sa vie, cette régularité d’approvisionnement et du maintien de la cadence de production.
Combien y a-t-il eu d’accidents mortels dont les victimes ont été justement des femmes qui allaient au travail ? Transportées dans des conditions pour le moins qu’on puisse dire inhumaines, elles n’ont jamais fui leurs responsabilités et le travail des champs s’est poursuivi sans faiblesse ni crainte du lendemain.
Il est curieux de relever que la présence des femmes dans bien des manifestations s’est quelque peu amenuisée et la raison est tout autre que l’indifférence : c’est elle qui assurait les semis, la cueillette, la transformation, veillait à la sécurité des pâturages et des troupeaux.
Ce sont aussi elles qui animent les foires en présentant des exclusivités et des produits issus de leur riche imagination.
Des produits du terroir qu’elles ont fini par imposer et qui, dans bien des cas, sont devenus des marques prisées, incontournables aussi bien sur le plan national qu’international. Le mariage des goûts et des couleurs a été une pleine réussite tant dans le domaine de la couture, broderie, tissage, que dans la mise en exergue des matières premières jadis délaissées et qui retrouvaient de nouvelles voies pour envahir les espaces, décorer et rafraîchir.
De nouvelles alchimies
A chaque foire régionale, les visiteurs se retrouvaient devant de nouvelles combinaisons, de nouvelles alchimies qui chatouillaient les palais ou émerveillaient les yeux. Ces doigts de fées transformaient tout et donnaient une idée de ce que pouvait inventer un esprit imaginatif qui refuse de plier devant la paresse et qui s’est, une fois pour toutes, engagé à partir à l’assaut de l’avenir avec fougue, assurance et confiance.
D’ailleurs, la constitution des stands de ces foires est fort significative : la domination de la présence féminine est visible. La variété est une preuve de ce savoir-faire qu’elles ont acquis en comptant sur leurs propres efforts et en allant au-devant des difficultés qu’elles ont su aplanir pour s’offrir un métier appelé à rayonner et à devenir un gagne-pain. Elles ont ostensiblement mis un terme à la main tendue en quête d’un travail. Bien des femmes et des jeunes femmes se sont ainsi converties en …cheftaines d’entreprises, qu’elles ont su monter prudemment, mais avec assurance, au gré de leur expérience et de leur volonté de briser le cercle des refus qui ont fermé les portes et poussé vers le désespoir.
L’agriculture en priorité
Le milieu agricole, que les garçons ont tendance à fuir pour la dureté du travail, la rigueur qu’il exige et la ponctualité du travail qu’il réclame, mobilise près d’un demi-million de femmes. Cela représente ni plus ni moins 43% des actives en milieu rural. Les petites entreprises touchant à l’agriculture et à la pêche sont en nette progression. Les chiffres d’affaires dénotent une amélioration constante des opérations et c’est ce qui encourage les femmes à s’y aventurer, ouvrant ainsi de nouveaux horizons et mettant fin à cette prudence injustifiée qui réduisait considérablement le rayon d’action d’une agriculture loin d’avoir atteint ses limites.
L’ouverture de nouveaux marchés, la mise sur le marché de produits finis ou transformés de meilleure qualité, demeurent des objectifs à atteindre pour mettre sur orbite cette femme rurale que l’on ne peut plus réduire à une simple main-d’œuvre à bon marché.
Au bon moment
La dernière visite effectuée par le chef du gouvernement à Siliana pourrait être un point de départ pour une politique plus agressive en matière de formation, production et commercialisation pour les produits des femmes rurales.
C’est ainsi, qu’entre autres décisions importantes, un lot de terrain a été réservé à la construction d’un siège pour la vente des produits de ce gouvernorat avec une enveloppe de 168 mille dinars.
Cette décision sera étendue à tous les gouvernorats du pays.
La promulgation d’une loi organisant le transport des ouvrières agricoles mettra un terme (nous l’espérons) aux drames qui ont endeuillé bien des familles ces dernières années.
La réalisation au plus vite d’un village professionnel à Makthar
L’examen des meilleurs moyens de tirer des avantages du programme « Profits » pour la création d’emplois directs au profit des femmes rurales, tout en cherchant de quelle manière bénéficier des grands projets lancés par le ministère de l’Agriculture.
Des décisions qui arrivent au bon moment.